MALI : LA JUNTE LANCE DES CONCERTATIONS NATIONALES SUR LA TRANSITION AU MALI, SANS L’EX-REBELLION TO
Les colonels qui ont renversé le président, Ibrahim Boubacar Keïta, ont promis de rendre les commandes aux civils à l’issue d’une transition d’une durée encore indéterminée.
La junte au pouvoir au Mali depuis trois semaines lance, samedi 5 et dimanche 6 septembre, une vaste consultation avec les partis et la société civile sur la transition censée ramener les civils à la tête de ce pays en proie aux attaques djihadistes meurtrières. Les colonels qui ont renversé le président, Ibrahim Boubacar Keïta, le 18 août ont promis de rendre les commandes aux civils à l’issue d’une transition d’une durée encore indéterminée.
« Nous abordons une nouvelle histoire de notre pays. Cette étape cruciale nécessite une profonde réflexion et l’implication de l’ensemble des filles et des fils de la nation », a déclaré à l’ouverture des travaux Malick Diaw, numéro deux du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) mis en place par les putschistes. « La concertation nationale se poursuivra du 10 au 12 septembre 2020 [à Bamako] avec la participation des délégués régionaux et ceux de la diaspora », a précisé Ismaël Wagué, le porte-parole du CNSP.
Mais la forme et la durée de la transition, deux sujets de friction avec la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cédéao), qui a imposé des sanctions aux nouveaux dirigeants militaires, ne sont pas encore fixées.
L’EX-REBELLION TOUAREG ABSENTE
Le lancement de cette large consultation avait subi un sérieux contretemps le week-end dernier. Les militaires l’avaient reportée, en pleine querelle avec un acteur primordial de la crise, le Mouvement du 5 juin/Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), une coalition d’organisations et de responsables politiques, religieux et civils réunis par leur opposition à l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta.
Le M5-RFP, ulcéré de ne pas avoir été invité à la première rencontre, figure cette fois explicitement parmi les participants annoncés, avec les partis politiques, les organisations de la société civile, d’anciens groupes rebelles, les syndicats et la presse.
Aucun représentant de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), l’ex-rébellion à dominante touareg, signataire de l’accord de paix de 2015 destiné à mettre fin à la crise traversée par le pays depuis 2012, n’était cependant présent samedi, faute d’entente avec la junte. Dans un communiqué, la CMA a fait savoir que « les mesures de confiance nécessaires à la construction d’un partenariat pour des responsabilités partagées ne semblaient pas d’actualité ».
DUREE DE LA TRANSITION
Pour les militaires, le temps presse : les dirigeants ouest-africains, qui ont réclamé une « transition civile » et des élections dans les douze mois, se réunissent lundi avec le Mali en tête de l’ordre du jour. La pression vient aussi du terrain : au moins dix soldats maliens ont été tués jeudi dans une embuscade dans le centre du pays, près de la frontière mauritanienne, soit la troisième fois que l’armée essuie de sévères pertes depuis le putsch.
La junte a proposé initialement trois ans sous la conduite d’un militaire, avant de rabaisser la durée à deux et de se dire ouverte sur son chef. Le M5-RFP a de son côté proposé une transition d’une durée de dix-huit à vingt-quatre mois, avec des civils aux manettes des institutions.
L’ex-président Keïta, en résidence surveillée à Bamako selon son entourage, s’apprête quant à lui à quitter le Mali, après avoir été hospitalisé cette semaine, victime selon les médecins d’un court accident vasculaire cérébral (AVC). Il pourrait se rendre aux Emirats arabes unis pour des soins complémentaires, avec l’accord des militaires, selon ses proches.