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PORT DE MASQUES : TROIS FAUSSES IDEES CONTRE LA PANDEMIE DE COVID-19

Alors que le port du masque doit devenir obligatoire dans les lieux publics clos, plusieurs argumentaires diffusés sur les réseaux sociaux contestent son utilité.

« Gadget », « bâillon » ou carrément « outil d’esclavage », le masque est décrié dans une série de publications populaires ces derniers jours. Plusieurs argumentaires diffusés sur des sites Internet et les réseaux sociaux s’indignent ainsi de la décision du gouvernement de rendre le port du masque obligatoire dans les lieux publics clos à compter de la semaine du 20 juillet pour contrer une reprise de l’épidémie. Mais s’ils revendiquent de développer une analyse médicale, leurs principaux arguments ne convainquent pas les spécialistes du sujet.

1 – « L’utilisation prolongée du masque est dangereuse »

Ce que dit la rumeur

« L’utilisation prolongée du masque provoque une hypoxie » (un manque d’apport en oxygène), assure un texte très partagé sur Facebook ainsi que sur des sites sensationnalistes comme Tripfoumi.com ou Nouvelhorizon.sn.

C’EST FAUX

Le port d’un masque s’accompagne d’une sensation d’inconfort, variable selon la personne qui le porte et le type de protection utilisée. Mais s’il demande un petit effort physique supplémentaire à son porteur pour respirer normalement, « cela n’a rien à voir avec un manque d’oxygène », tranche le médecin hygiéniste Philippe Carenco, responsable de service au centre hospitalier Marie-José-Treffot, à Hyères (Var). « Il n’y a pas de raison de craindre un manque d’oxygène lié au port du masque dans les conditions normales d’utilisation » – en dehors, par exemple, d’une activité sportive intense.

Les différents types de masques ont une résistance à l’air (on parle de « respirabilité »), qui leur est propre, est « calibrée » et est « incluse dans la norme » à laquelle ils répondent, explique ce spécialiste des textiles de santé. C’est un élément central de la confection de ces protections, « sinon on ferait des masques en béton » qui protégeraient très bien du virus mais ne permettraient pas de respirer correctement, observe M. Carenco.

Cependant, les fabricants recommandent généralement dans la notice qui accompagne leurs masques une durée d’utilisation de l’ordre de quelques heures. Mais, selon le docteur Carenco, ce n’est pas à cause d’une durée limite au-delà de laquelle le masque ne permettrait plus de respirer. Le but est qu’il conserve son efficacité. Il est notamment préconisé de renouveler un masque dès lors qu’il est humide. Dans tous les cas, une insuffisance respiratoire s’observerait rapidement et pas au bout de quelques heures, selon ce spécialiste.

2 – « Les masques sont inutiles, car les virus sont plus petits que leurs mailles »

Ce que dit la rumeur

L’argument revient régulièrement dans les messages hostiles au port du masque. Par exemple, dans un long texte au vitriol publié sur Facebook à la fin du mois de mai :

« [Les masques] sont inutiles (…) car les virus sont si petits (0,1 micron) qu’ils passent à travers les mailles des masques les plus sophistiqués (0,3 micron). C’est un peu comme si la grosseur de la maille correspondait à un tunnel de métro pour nous, il y a de l’espace. »

C’EST FAUX

La rumeur part ici d’un constat scientifiquement valide : le virus peut être charrié par des particules plus petites encore que les pores des masques utilisés couramment. Les particules du virus responsable du Covid-19 mesurent, en effet, environ 0,12 μm (soit 0,12 millième de millimètre). Un masque conçu avec des mailles suffisamment fines pour les piéger ne permettrait donc pas de respirer correctement.

Les masques fonctionnent plus comme des « aimants » que des « filets » à virus.

Certes, les mailles des masques font la taille d’un « tunnel de métro » pour une particule de virus. S’il est tout de même recommandé d’utiliser des masques dans la lutte contre le SARS-CoV-2, c’est parce que ces derniers reposent sur un autre effet : les particules sont en bonne partie piégées malgré tout, par effet électrostatique.

Les mailles du masque font office de barrière électrostatique. « Par effet des forces intermoléculaires, dites de Van der Waals, lorsqu’une très petite particule telle que le SARS-CoV-2 rencontre une fibre, elle s’y colle définitivement. La multitude de fibres non tissées multiplie les chances de collision », et donc l’efficacité du filtre, expliquait en avril au Monde le physicien Jean-Michel Courty.

Les masques ne sont donc pas tant des filets que des sortes d’aimants à particules de virus. D’ailleurs, « les masques perdent en charge électrostatique lorsqu’ils sont mouillés ou qu’ils vieillissent, et c’est pourquoi ils deviennent alors moins efficaces », observe le médecin hygiéniste Philippe Carenco.

3 – « Les masques ne protègent pas, c’est marqué sur les boîtes »

Ce que dit la rumeur

« Les masques ne protègent pas des infections ni des virus », dénonce un message diffusé sur Facebook, illustré par la photographie d’un emballage de « masque d’hygiène 3 plis bleu ». On y lit, en effet : « Ce produit ne protège pas des contaminations virales ou infectieuses. »

C’EST PLUS COMPLIQUÉ

Cette publication illustre bien la complexité du débat sur les masques. Pour en comprendre les enjeux, il faut d’abord comprendre qu’il existe plusieurs types de masques. Au départ de l’épidémie, on en comptait principalement deux utilisés dans la lutte contre le SARS-CoV-2 :

  • les masques de protection respiratoire individuelle (comme les fameux FFP2), qui sont équipés d’un système filtrant, qui visent à protéger le porteur des risques d’inhalation d’agents infectieux. Ces masques sont destinés à un usage médical, en priorité pour celles et ceux qui pratiquent des gestes invasifs respiratoires sur des patients intubés ;

  • les masques antiprojections, dits « chirurgicaux », conçus pour un usage médical, qui ont pour vocation principale d’éviter que ceux qui les portent ne rejettent des sécrétions dans l’air et contaminent les autres. Ce sont ceux que, par exemple, les dentistes ou les personnels hospitaliers arboraient bien avant la pandémie de Covid-19.

La pénurie de masques chirurgicaux a poussé les autorités à réserver ces derniers en priorité au personnel soignant et à favoriser l’émergence d’un troisième type de masques : le « masque barrière » destiné au grand public, pour une activité quotidienne ou professionnelle. Ces derniers ne respectent pas, pour l’heure, de normes à proprement parler (contrairement aux masques à usage médical). Le gouvernement propose cependant une base de données de tests pratiqués sur des dizaines de modèles, et l’Afnor a élaboré une spécification destinée à guider les fabricants. Par ailleurs, les études scientifiques manquent encore pour évaluer rigoureusement leur efficacité.

Le port du masque vise à limiter la propagation du virus, pas à protéger individuellement leurs porteurs.

Pourquoi, alors, lit-on sur des boîtes de masques qu’ils ne protègent pas contre le SARS-CoV-2 ? Tout simplement parce qu’ils ne sont pas conçus pour offrir une protection individuelle à leur porteur, mais pour contribuer à des mesures collectives visant à limiter la propagation du virus responsable du Covid-19. Le docteur Carenco insiste ainsi sur trois règles, les « trois “M” : le port du masque, l’hygiène du masque et le respect d’une distance d’au moins un mètre entre les personnes ». L’Académie nationale de médecine a, elle aussi, recommandé son utilisation dès le 5 avril, en complément des autres gestes barrières et mesures sanitaires.

Dès lors, aucun fabricant de tels masques ne peut raisonnablement prétendre offrir une protection individuelle à son porteur contre le nouveau coronavirus. C’est pourquoi on trouve, sur la plupart des boîtes qui sont commercialisées aujourd’hui des avertissements à ce sujet.

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