L’UE : LA CONSOMMATION REPART, MAIS PAS PARTOUT EN EUROPE.
Le commerce de détail a retrouvé ses niveaux d’avant-crise, affirme le KOF. Mais cette réalité cache des situations disparates. Et l’amélioration du climat de consommation ne profite toujours pas à l’hôtellerie et à la restauration.
Il y a du mieux, voire du beaucoup mieux. L’économie suisse se remet peu à peu d’un printemps 2020 marqué par la pandémie de Covid-19 et ses paralysies. Selon l’étude présentée mercredi par l’institut zurichois KOF, tous les secteurs, à l’exception de l’hôtellerie et de la restauration, font état d’une amélioration de la situation en juillet.
Parmi eux, le commerce de détail se distingue. Le secteur a même retrouvé le rythme d’avant-crise, en janvier 2020. Mais «cette amélioration cache des situations très différentes selon les cas», a prévenu l’économiste du KOF, Klaus Abberger, lors d’une vidéoconférence. Les principaux bénéficiaires de ce rebond sont les grands magasins et les vendeurs en ligne, qui font état d’une progression exponentielle de la marche de leurs affaires.
Le jardin, le sport et l’électronique
L’institut GfK, qui a également publié une étude mercredi, indique qu’au premier semestre le commerce de détail aurait même progressé de 5,5% par rapport au premier semestre 2019. Dans le détail, cette performance a été réalisée grâce aux ventes dans l’électronique, le jardinage, les meubles d’extérieur, les barbecues et les piscines. Mais aussi, les vélos électriques et les appareils de fitness.
Le segment alimentaire est également responsable de cette hausse. La constitution de stocks, dès la mi-mars, la fermeture des restaurants, mais aussi la chute drastique du tourisme d’achat ce printemps ont soutenu les affaires de vendeurs de nourriture. Selon une récente étude de Credit Suisse, ce sont 2 milliards de francs d’achats à l’étranger qui n’ont pas été effectués entre mi-mars et mi-juin.
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Pour le commerce de détail, la situation n’est cependant pas dénuée d’incertitudes. Les prévisions de chiffres d’affaires annuels restent particulièrement prudentes, malgré la reprise observée ces derniers mois. Un autre sondage, publié mardi par l’Office fédéral de la statistique (OFS), indique que si le climat de consommation s’est nettement amélioré (l’indice est à -12 points en juillet, contre -39 en avril), la retenue reste de mise, notamment sur les achats importants tels que des voitures, des meubles ou des appareils ménagers.
Mais il y a un autre poste de dépenses que les Suisses ne sont visiblement pas prêts, pour des raisons sanitaires ou économiques, à relancer: les hôtels et les restaurants. Dans ce secteur, déplore le centre conjoncturel de l’EPFZ, le creux n’est pas encore atteint. Les sondés s’attendent à une baisse de 38% de leur chiffre d’affaires cette année. C’est le seul domaine d’activité qui ne signale aucune amélioration en juillet, tant sur la marche des affaires que sur la situation de l’emploi. Mardi, les statistiques de l’OFS confirmaient déjà que les nuitées avaient chuté de 48% au premier semestre. Une légère embellie sur le front des réservations semblent toutefois se dessiner.
Le prix d’une autre vague
Globalement, estime le KOF, le PIB suisse devrait se contracter de 4,9% cette année. Une prévision légèrement meilleure que celle de mai, à -5,1%. «Les entreprises estiment que le pire est derrière nous», résume Klaus Abberger. Mais sur le plan sanitaire, «nous avons reçu des informations contradictoires ces dernières semaines».
Partant de ce constat, l’institut zurichois s’est attelé à estimer l’effet d’une potentielle deuxième vague de Covid-19 sur l’économie suisse. Avec les précautions verbales nécessaires: «Il ne s’agit pas de broyer du noir, mais d’envisager une hypothèse qui semble moins improbable qu’il y a quelques mois», souligne le directeur du KOF, Jan-Egbert Sturm.
Ce scénario implique un taux de reproduction du virus – nombre de personnes infectées par un malade – supérieur à 2 (contre 2,67 début mars, 0,65 début avril et 1,07 fin juillet). Il mènerait à des mises en quarantaine d’employés, des ralentissements dans les entreprises, des limitations de voyages vers et depuis l’étranger ou encore des fermetures ciblées de commerces ou de restaurants. «Sur la base de l’expérience acquise, nous nous attendons à des restrictions moins radicales, mais prolongées en raison du risque plus élevé d’infection au cours de l’hiver», précise le KOF.
Ainsi, l’institut considère que le PIB suisse baisserait de 6%, si ce scénario se matérialise. Soit seulement 1,1% de croissance en moins que la «normale» post-Covid, évaluée à -4,9%. En 2021, la production économique suisse ne progresserait que de 2,9%, contre 4,1% si une deuxième vague ne s’abat pas sur le pays.
Ces calculs, concède Jan-Egbert Sturm, «ont une part de subjectivité». Notre destin, rappelle-t-il, reste étroitement lié à celui de nos partenaires commerciaux. A commencer par l’UE, la Chine et les Etats-Unis. Et dans ce dernier pays, la première vague est encore loin d’avoir fini son travail de sape.